Voici un ouvrage rare qui nous aide à comprendre l’orientation et les
perspectives actuelles de la formation professionnelle continue. Il est le fait de Pierre Caspar ingénieur des mines et sociologue, professeur émérite au CNAM, auteurs de
nombreux ouvrages et co-auteur d’un best-seller dans la discipline « Traité des sciences et des techniques de la formation ». La première partie est un rappel de bon sens fort utile. On
apprend d’abord grâce aux problèmes professionnels qu’il s’agit de résoudre. La deuxième partie est une analyse historique qui montre comment les ingénieurs et les pédagogues se sont rencontrés
et comment s’est développée l’ingénierie de formation. La troisième partie montre comment l’irruption de l’économique dans la formation transforme les données du marché. La notion
d’investissement immatériel est éclairante à cet égard. L’exemple du CNAM est mis en avant en témoignage de ce phénomène. Enfin la quatrième partie s’attarde sur l’enjeu de l’accès aux savoirs,
un enjeu majeur pour l’humanité. Cette partie interroge les mutations actuelles, la singularité des savoirs, l’impact des nouvelles technologies et la civilisation des réseaux, la transformation
du rôle des formateurs et des organismes de formation et l’émergence de ce que l’auteur appelle le non-conventionnel que l’on pourrait aussi désigner comme des apprentissages informels. Enfin en
guise de conclusion l’auteur offre un ensemble d’ouvertures comme autant de recommandations pour développer encore et toujours la formation tout au long de la vie. Finalement on appréciera de
l’ouvrage de nombreuses facettes notamment le retour aux sources, l'interrogation sur l'ingénierie de formation, la réflexion sur l'idée d'investissement immatériel, le questionnement sur la
recherche. Pour ces aspects d'ancrage le livre est une vraie mine riche et porteuse de sens. La façon dont se posent les questions de formation aujourd'hui en entreprise, les liens entre les
organisations et les individus interrogent. Plusieurs questions restent en suspens. Quid des organisations apprenantes qui réussissent à sortir des manuels théoriques pour s'installer en réalité
dans les entreprises? Quid des universités d'entreprise dont l'offre poursuit d'autres visées que le seul objectif de formation? Les nouveaux rapports aux savoirs se mettant en place grâce aux
technologies de l'information se développent en dépit des formateurs. Qu'est ce que cela peut produire? Finalement la question que pose l'ouvrage est de savoir si l'ingénierie serait le meilleur
moyen de penser la formation. Car incidemment ne reproduit-on pas la séparation de Taylor entre les ingénieurs qui planifient la formation et les stagiaires/formés/apprenants qui
l'exécutent? Nous avons beaucoup de choses à imaginer pour le futur et c'est une belle perspective que nous offre cet ouvrage.