Il y a entre l’homme et les objets qui l’entourent un rapport de transformation réciproque. L’homme façonne ses outils tout autant qu’il est façonné par eux. Ce qu’il place dans son environnement, fait évoluer sa vision et ses usages du monde. Ce fait est observé depuis les premiers grattoirs des hommes préhistoriques. Plus que son intelligence, ce qui caractérise l’homme, c’est le ce lien continu de modification de son environnement par ses outils (outil d’action physique sur le monde ou bien outils de pensée). Que nous disent les objets électroniques qui se répandent aujourd’hui ? Tout d’abord, nous sommes marqués par une expérience de connexion continue à notre milieu. La notion intérieur/extérieur, moi/le reste du monde révèle de nouvelles porosités. L’information est labile pluggable, ou détachable à volonté. Le nombre d’objet connectés et les applications associées croît. Ce phénomène s’accélère avec le wifi, les puces RFID et leurs micro-fréquences, forme d’étiquettes qui qualifient de plus en plus précisément des états et des distances.
Les données semblent couler, liquide, dans toutes les infrastructures, murs objets, espaces. Les ondes les portent. Aucune barrière ne les retient plus. Le bluetooth a gagné nos téléphones a migré vers nos enceintes devenues sans fils. La mobilité, l’hyper mobilité même s’invitent dans nos modes de vie. Nos représentations transforment le temps. La connexion continue nous rend impatient. Pas question d’attendre cela doit passer. Ubiquité et instantanéité sont les maitres mots. Les robots, les lunettes, les montres tous ces objets ne sont pas seulement des façons de contrôler le monde. L’activation à distance est remarquable, mais au-delà de ce prodige de magicien, ce qui retient l’attention c’est l’abaissement des frontières entre soi et le monde ; le sentiment d’être devenu soi-même une souris qui déclenche des signaux de l’environnement et pas seulement un cerveau-mécanisme. Les objets connectés font plus que de nous doter de nouveaux pouvoirs, ils déterminent notre façon d’être au monde et d’être en relation avec les autres. Il en découle une mutation profonde sur ce que signifie être au monde, sur ce qu’est apprendre et par quel chemin opère la transformation. Le numérique repose la question de la mémoire. Que faut-il garder en tête ? Que faut-il déléguer aux objets ? Comment penser la multitude ? Qu’est-ce qu’une information qui vaut d’être sue ?