Et voici les conférenciers tous comme un seul cheval à hennir des bienfaits et de l'absolue nécessité d'innover. Ils se dressent aux tribunes proclament leur amour du neuf, de l'inédit, du dépoussiéré. La cavalcade de ces alezans semble irrésistible. Nous assistons à une charge sans précédent, laissant l'ancien monde loin derrière.
On piaffe avec eux d'un monde meilleur plus équilibré, plus juste. Certains affirment même que l'école produit de la conformité et que l'actuelle norme réside dans l'innovation. Pour s'en tenir à sa mission, l'école devrait innover avant tout.
S'il est formidable de voir pousser du neuf partout il me semble essentiel de ne délaisser aucun arpent de prairie, au risque que l'innovation tant vanté ne produise plus d'inégalité et laisse de côté certains.
Méfions nous des coups de sabots définitifs et rappelons qu'en dans tout cheval sommeille un trotteur comme un bourrin. Ne perdons jamais de vu les acquis des vielles expériences. Si les nouvelles sont appréciables et méritent sans nul doute toute notre considération, elles ne seraient rien sans les expériences passées avec lesquelles elles conservent des liens.
Dans la mangeoire de l'innovation gardons nous de tout avaler. Trions le picotin. Le numérique est-il toujours un monde merveilleux, ou nous met-il des brides de plus en plus serrées? Les nouvelles formes d'autorité et de relations entre les personnes ne finissent-elles pas de déliter les derniers repères communs?
Le mélange des passions et de la raison qu'on nous promet partout, améliore t-il la légitimité de l'action? Dans un monde en totale transformation, les discours sur l'innovation sont parfois des masques qui embarquent toujours plus de la même chose et ne se soucient guère, de ceux, qui, quoiqu'il se passe, sont destinés à rester des palefreniers. Car à chaque innovation il y a des laissés pour compte.
ps) je ne fais de leçon à personne je hennis avec le troupeau