Et si le management n’était pas une invention américaine du XXeme siècle ? S’il était possible d’en trouver des racines à d’autres époques sur d’autres continents ? C’est dans cette exploration que nous guide Georges Nurdin, Directeur de Paris Business School. L’opus qu’il nous propose brasse en un peu moins de 140 pages des idées managériales nées sous des latitudes lointaines pour résoudre des problèmes de direction, de motivation et d’organisation très différents d’aujourd’hui. Mais à y regarder de plus prés, il n’est pas si sur que cette différence soit si prononcée. Cinq textes composent l’ouvrage. Le premier rédigé par Nurdin et une archéologue exhume l’évolution de la pensée managériale à travers les âges et les cultures. Il montre comment les paradigmes managériaux préexistaient dans l’antiquité. Et c’est une curiosité de découvrir prés de 4000 ans avant Jésus-Christ des prescriptions organisationnelles ou comptables dans des tables enfouies à Uruk (ville en Irak). Comme si le credit-management n’avait de nouveau que le nom. Le deuxième développement évoque la prise en compte des différences culturelles dans la gestion d’une organisation. Ces différences sont liées à des couches historiques qui se sont sédimentées à travers le temps. Le troisième texte est l’œuvre d’une philosophe qui rappelle toute la dette de la pensée moderne à l’égard de la Grèce et notamment à Aristote. Notre philosophe commence par s’étonner du nombre d’occurrences issues des moteurs de recherche lorsque sont saisis simultanément les mots de « management » et « d’Aristote ». La place et l’influence de l’économie des grecs anciens sont revisitées. Le modèle en vigueur est alors la gestion de la maison. Cette économie familiale dont différents auteurs établissent un lien avec le « ménagement » qui est l’art d’organiser sa maison. Mais de nombreuses notions très actuelles semblent avoir déjà été éprouvées comme le principe de précaution qui pouvait aussi être désigné comme prudence, c'est-à-dire dans la pensée d’Aristote la chance et le risque de l’action humaine qui nécessite de faire œuvre d’éthique. La leçon chinoise est professée à partir des textes de Sun Tzu. Ce texte du Véme siècle avant Jésus-Christ permet encore aujourd’hui de disposer de préceptes particulièrement adaptés à la gestion de l’entreprise. Les 13 chapitres de ce monument littéraire évoquent les attributs du leader, la discipline, les tactiques, les faibles et les forts, la force de l’élan, l’utilisation d’espions. Ces notions apparaissent particulièrement utiles dans la gestion de l’entreprise et l’exemple proposé par l’auteur en atteste la pertinence. Le dernier texte s’intitule histoire du management de l’Islam à la Renaissance. Il montre une période ou de nombreuses institutions le plus souvent religieuses sont confrontées à des questions de gestion de domaine. Comment les découvertes arabes du système décimal sont introduites en occident et permettent le développement des techniques de comput dans les documents administratifs, comment les banques se créent et permettent l’essor que l’on connaît. La gestion du trésor ou des voiries, la fiscalité et le capitalisme qui se mettent en place sont éminemment modernes. L’opus de Nurdin est plaisant à lire et nous remémore la part de construction historique sur lequel le management s’est bâti, non pas comme une importation hors sol, mais comme une lente maturation de ce qui reste un art.