Voici un ouvrage passionnant écrit par des chercheurs de différentes écoles de commerce (Advancia, Dauphine, HEC, CNAm, Reims management school) et un consultant (Gérard Pavy) emmenés par Xavier Deroy. L'ouvrage défend la thèse que la stratégie est un processus vivant mettant en jeu le pouvoir. Il n'y aurait pas d'un côté des stratéges et de l'autre un ensemble de collaborateurs n'ayant qu'à appliquer et à "s'aligner", mais un jeu organisationnel ou le champ social aurait un rôle prééminent. Si l'ouvrage puise aux théories de l'organisation (organizational studies dans le vocabulaire anglais), il mobilise de nombreuses disciplines comme l'anthropologie, la sociologie, la psychologie, l'économie et même l'esthétique. La première partie expose la formation de la stratégie et le rôle des institutions, la façon dont les arrangements institutionnels se mettent en place. La deuxième partie essaye de relier la stratégie, la norme et l'individu. Il y est exposé l'école de la contingence et de l'agir stratégiue, les modes stratégiques et l'apprentissage du changement. Le regard anthropologique apporte son lot de remarques et de question sur l'agir stratégique et les acteurs en relation, les paroles, les symboles, la mobilisation de l'imaginaire, le rapport vécu au temps, à l'espace mais aussi à l'éthique. Enfin la troisième partie présente la stratégie comme la projection d'une expression. Le chapitre sur l'esthétique et la peinture est à cet égard lumineux. La vision de la stratégie proposée n'est pas commune et mérite véritablement l'attention des chercheurs et des praticiens chargés de réfléchir sur l'agir stratégique et pas seulement la réflexion stratégique. Car ce qui compte vraiment n'est ce pas l'action?