Sylvie Trosa est chargée de mission
auprès du service du rapport général de la cour des comptes en charge de l’évaluation. Elle a acquis une expérience internationale de l’administration au cours de sa carrière. Elle s’en
nourrit d’ailleurs largement dans son ouvrage qui cherche à expliciter la crise du management public. Dans la préface, Annie Bartoli rappelle avec malice que le management est une notion
plus que centenaire et que les grandes études réalisées sur le management et la décision au cours des deux derniers siècles ont d’abord été réalisées dans la sphère publique.
Il s’agit donc d’en comprendre les mécanismes plutôt que d’en affirmer son incompatibilité pour ses origines hors-sol.
L’ouvrage débute sa première partie sur une critique du « nouveau management public » et une présentation des acteurs de la réforme. Elle présente des exemples ou il est possible d’être efficient et inefficace, elle présente encore comment la réforme s’engage dans une controverse dans une crise budgétaire et les ambigüités qui demeurent. Aux réformes sans lendemain est opposé un management en quête de sens. Les relations difficiles entre ministres et administrations sont observées et la rivalité entre cabinet et administration est soulignée. La philosophie instrumentale et l’excès du tout chiffré est dénoncé. Aux dérives observées du tout quantitatif est proposée une alternative : un vrai management public.
C’est le titre de la deuxième partie qui s’évertue a montré comment le management est d’abord un équilibre. Dans cet équilibre, l’auteur explique la complexité de poser un objectif et surtout d’évaluer un impact. La logique d’une réforme est présentée comme le réglage d’un curseur entre exigences contradictoires avec pour arbitre le choix des priorités. Un regard critique est porté sur les outils de gestion et la nécessaire clarification des objectifs qui les accompagne. Les outils ne serviraient que s’ils ouvraient des marges de manœuvre. Les approches de changement par le haut ou par le bas montre l’importance du choix des outils, et le dosage de la prescription. L’auteur assure un éloge de l’innovation au moyen d’exemples de réformes plus ou moins abouties. Il montre le rôle de l’évaluation au quotidien et la nécessité de s’accorder sur ce qui est au cœur de l’évaluation. Pour que les réformes s’implantent et le management joue sa fonction, l’administration doit à la fois être souple et intègre. Or la gestion par corps actuelle limite la mobilité, crée des disparités de rémunérations, encourage la revendication et la conflictualité, produit des coûts de gestion excessifs. Le double encadrement des grades et des emplois pourraient être visités au regard des expériences Danoise et Suédoise.
La dernière partie de l’ouvrage évoque le sens de l’action. En introduction, le manque de sens explicite est pointé. Il s’agirait de sortir d’une dichotomie simplificatrice et d’assumer un management qui dit les choses. Le sens passerait aussi par un discours positif, suffisamment de temps et plus de responsabilité. Il y aurait enfin un équilibre à trouver entre les directives données et une délégation de pouvoirs plus large.
Voilà un livre fort utile dans un pays qui compte plus de 5 millions de fonctionnaires et dont les différentes fonctions publiques abritent le plus grand nombre de managers.