C’est fort d’une expérience variée, alliant recherche en sciences biologiques, direction des ressources humaines, syndicalisme, mandat communal et enseignement du management que Jacky Chollet propose une vision de la vie des managers. A l’instar des discours officiels ou filtrés, le projet de faire parler les « vrais gens » n’est pas nouveau. Le précédant de Pierre Bourdieu donnant largement la parole à tout un ensemble de personnes en souffrance dans « La misère du Monde » est célèbre. Les essais pour s’approcher de ce que vivent vraiment les managers sur la base de récits a été esquissé par Vilette dans « Le manager jetable », ou dans « Une anthropologie des managers » de Flamant ou encore associé à un essai d’analyse par Laroche et Bellier dans « Moi manager ! ». La constante de ces ouvrages est de partir d’histoires réelles et de dénoncer l’écart entre, des discours tournant en boucle à la gloire du management et un ressenti exprimé de la part de ces managers qualifiés dans l’ouvrage de « manager de terrain ». Le qualificatif « de terrain » nous fait penser aux tomates. De la même façon qu’il y aurait des tomates de jardin et des tomates poussées « hors sol », nous pourrions distinguer des managers enracinés dans le réel et d’autres, peut être des dirigeants, plus éthérés, éloignés du concret. Ce faisant, et c’est ce que révèle les récits, les managers de terrain ont du goût et du caractère. Pour asseoir la critique de l’écart croissant entre discours et réalité l’auteur s’y prend de la façon suivante. Sur un ensemble de thèmes clés pour le management (donner du sens, anticiper, motiver son équipe, motiver un collaborateur, développer la confiance, manager avec empathie, adapter son management, écouter son équipe, déléguer, organiser, gérer les conflits, décider, gérer le stress, gérer les crises, comprendre la direction, subir les arbitrages, évaluer, préparer l’avenir), il repère des prises de position, des déclaration, ou des éléments de langage significatif dans la presse ou sur internet : d’un dirigeant, expert ou consultant, et il les met en perspective avec le récit réel d’un manager en situation. L’effet de contraste est saisissant. L’auteur s’efforce alors à décrypter le vécu exprimé et les conduites adoptées par les managers de terrain. Si l’expression des managers ayant la parole apparaît représentative c’est certainement parce qu’ils appartiennent à toutes les fonctions de l’entreprise, que leurs expériences s’ancrent dans des activités variées aussi bien dans des grandes que des petites entreprises, qu’ils sont des hommes ou des femmes et qu’ils mènent des équipes ou des projets de petites ou de grandes dimensions. En conclusion l’auteur formule quatre constats pour les managers. Le premier est de se former et de rester en éveil à toute proposition professionnelle intéressante, le second est repose sur un ensemble de prescriptions comportementales (donner du sens, écouter, être exigeant, fixer un cadre, développer, défendre et reconnaître ses collaborateurs, le troisième est d’anticiper, et le quatrième est d’apprendre l’Anglais.