Le récit de ce manager est marqué par le thème de la blessure initiale comme une faille qu’il s’agit de colmater. La rencontre avec la « voie du commerce » semble alors comme une vocation qui répond à un puissant désir d’effacer des jugements humiliants après 3 redoublements en sixième, cinquième et terminale « J’entendais régulièrement dans les dîners de famille le pauvre mais qu’est ce qu’on va en faire ? ». Si l’éducation apparaît hétéroclite ou décousue « je viens d’un milieu ou mon père est artiste peintre je suis plutôt habitué à un univers plutôt d’artistes », « ma mère ne suivait pas mon éducation », la rencontre d’un esprit ouvert avec un beau-père plus cartésien, donne du sens à une trajectoire et permet selon le narrateur de rebondir. Si les motifs du récit de la première embauche empruntent au romanesque, le premier emploi de commercial est un succès. « Quand je suis rentré chez mon premier employeur, dans la banque, je l’ai rencontré en boîte de nuit heu il m’a dit bon on va se voir le lendemain. On s’est vu le lendemain et on a commencé à démarrer une relation commerciale ensemble ». La construction du manager se décline ensuite comme un parcours maillant maîtrise technique, intuition, rage de réussir collectivement et talent. C’est toujours en cherchant à être le meilleur que le récitant se challenge et se motive. Il semble entrer dans une compétition sans fin. Si une reconnaissance toujours plus élevée est attendue de la Direction Générale, c’est surtout de celle de ses collaborateurs proches que le narrateur se nourrit jusqu’à développer une forme de féodalité faite d’alliance allant au-delà de l’entreprise. « Moi j’ai deux responsables co avec qui c’est plus facile, avec qui j’ai commencé à travailler dans une autre entreprise, je les ai embauchés comme vendeur, ils sont maintenant responsables commercials chez moi et ils m’ont suivi parce qu’à un moment donné ils me font confiance et je leur fais confiance et demain si je change d’entreprise, j’ai mes trois voir mes 4 responsables co qui souhaiteraient repartir avec moi ». Car c’est bien le collectif qui est en permanence mis en avant, l’entraînement et la mobilisation d’équipes et de réseaux (jusqu’à 1500 personnes). Cette réussite dans la mobilisation d’un collectif est perçu comme un avantage génétique : « Génétiquement on a des points de force et des points de faiblesses, moi mon point de force je pense que c’est d’avoir une forte capacité dans le travail en équipe ». Cette prédisposition s’exprime par une capacité repérée et dés lors systématiquement cultivée dans les négociations professionnelles, dans la façon d’apprendre, dans les postures adoptées avec les autres. « je dirai que j’ai une capacité émotionnelle assez forte donc de pouvoir être un peu une éponge et de capter finalement assez rapidement percevoir qui j’ai en face de moi et finalement voir comment ou ce qui va l’intéresser ». Si le narrateur exprime une fierté de son parcours, de ses succès, il perçoit néanmoins des manques dans ses capacités analytiques, voir dans ses lacunes hors du registre affectif pour progresser encore vers des postes de directions générales auxquels il aspire.