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APPRENDRE AUTREMENT

APPRENDRE AUTREMENT

APPRENDRE AUTREMENT est le blog dédié aux approches innovantes de la formation dans les organisations


Et si l'obligation de formation disparaissait ? 1/2

Publié par CRISTOL DENIS sur 20 Mai 2013, 08:51am

Catégories : #Apprendre

Depuis plus de 40 ans il est une évidence qu'il convient "d'envoyer des salariés en formation", "d'organiser des stages", "de mesurer les acquis au retour de la formation". C'est la logique de la formation professionnelle continue.

Tout cela induit une immense paperasse (agrément, feuille de présence, programme, déclaration, statistiques etc.), car il s'agit de contrôler si tout est "imputable", c'est à dire si tout est conforme à ce que le législateur imagine comme étant un apprentissage. La difficulté de cette affaire c'est qu'il est bien difficile de circonscrire l'acte d'apprendre dans des formes prédéfinies et formalisées. Aucun expert ne saurait définir ce qu'est apprendre, car apprendre est consubstantiel à la vie. Qui peut prétendre définir ce qu'est la vie pour tout le monde? Qui peut définir l'expérience d'un autre ? On apprend comme on respire sans s'en apercevoir. Parfois il est utile de contrôler le rythme de sa respiration, de s'entraîner, de réguler, d'échanger avec les autres sur la meilleure façon d'inspirer ou d'expirer. Mais, là encore nul ne peut prétendre savoir ce que ressent celui qui apprend car l'axiome "j'enseigne donc tu apprends" est faux ou du moins pas systématique (demandez le à n'importe quel enseignant, il vous dira les difficultés de son métier). Nous avons donc des idées plus ou moins claires sur ce que signifie apprendre pour nous mais nous serions bien présomptueux à dire de façon affirmée ce qu'est apprendre pour les autres. Et pourtant nous qualifions a priori certaines modalités et nous en éliminons d'autres.

Tout cela produit aussi un immense bavardage les partenaires sociaux, les chercheurs, les politiques, les éducateurs-formateurs-enseignants, les gens tout le monde a son idée sur la question. C'est bien normal qui n'aurait pas d'idée sur la vie en général, sur la façon dont il respire ? Il en ressort une tendance de chacun à promouvoir ce que son expérience lui a enseigné. Celui qui a réussi dans le système méritocratique le porte aux nues, celui qui a une expérience de l'enseignement ou de la formation valorise sa pratique, celui dont les discours politiques portent dans l'opinion finit par croire à ce qu'il raconte et à le tenir pour une réalité. Il se produit alors de jolis slogans comme "être acteur de sa formation", trop peu appliqué dans la réalité. Cependant s'il est légitime d'avoir une opinion sur ce qu'est apprendre et comment le favoriser, il est bien dommage d'exclure les apprentissages qui ne se mesurent pas, les apprentissages informels, ceux réalisés en situation de travail, au cours de projets.

Tout cela génère un marché économique, des organisations qui se sont spécialisées pour proposer des stages, des formules, et aujourd'hui de la formation en ligne. Ce marché prend le plus souvent (à l'exception de quelques innovateurs et consultants) la forme des remboursement standardisés de la formation plutôt que des formes organiques et bien vivantes de l'apprendre. Il en découle des modalités pédagogiques formatées, comptables des offres de services calcifiées qui diffusent in fine les croyances de ceux qui prétendent orienter ce que signifie vivre, puisque apprendre est consubstantiel à la vie dans mon analyse.

Tout cela ne va pas, tout cela ne va plus du tout car les façons de vivre de la multitude s'éloigne de celle de ceux qui contrôlent et orientent le système. En fait il y a une telle diversité qu'il s'agirait de remettre sur d'autres bases la formation. Imaginons que l'obligation de formation disparaisse. Que se passerait-il? Je perçois plusieurs conséquences à une telle proposition iconoclaste :

1) le "marché de la formation" serait assaini de nombreux prestataires et intermédiaires dont l'apport au développement des compétences individuelles ou collectives est peu démontré (et souvent indémontrable malheureusement). Nombreux sont les organismes à reproduire des idées anciennes et par commodité des formes de stages qui ont fait leur preuve. Ils sont souvent dans des contraintes économiques et sous le joug de la commande publique qui leur impose la reproduction comme moyen de survie. Nous n'avons pas besoin d'idées anciennes mais d'idées nouvelles. Nous devons explorer le monde qui vient plutôt que de seulement préserver le monde qui fut.

2) cela conduirait à repenser l'acte d'apprendre et pas seulement, l'acte de gérer les budgets de formation. Il serait peut être possible de s'intéresser à pourquoi l'on apprend? comment cela se passe? et pourquoi investir de son temps dans l'apprentissage? Il serait envisageable d'associer les gens à leurs motivations de les encourager à bâtir des projets plutôt que de les mettre face plus ou moins adroitement à des catalogues.

3) cela obligerait les partenaires sociaux à sortir d'un dialogue ou réforme après réforme c'est toujours la complexité et l'usine à gaz qui gagne en superficie, laissant toujours de côté les individus les plus fragiles et les petites entreprises délaissés (les grandes entreprises disposent toujours d'experts pour récupérer un maximum de fonds).

4) la recomposition du paysage serait immense, elle créerait simultanément de nombreux dégâts (disparition d'organismes de formation, pertes d'emplois et suppressions d'offres peu qualitatives), elle ouvrirait de nouvelles questions et perspectives (que deviendrait le "magot" de la formation professionnelle?), elle permettrait soit de réorienter les fonds vers ceux qui ont des projets ou sont en difficultés ou au contraire d'augmenter les profits d'entreprises ne percevant pas les enjeux du développement des compétences.

Ce premier billet d'humeur brosse une vision tranchée et peu nuancée le prochain s'efforcera de regarder les choses d'une façon pragmatique.

Et si l'obligation de formation disparaissait ? 1/2
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