A force d'entendre les intellectuels qui glosent dans les médias sur la crise, l'immigration, les problèmes en veux tu en voilà. ils en appellent à l'histoire à la culture, aux analyses sociologiques, ad nauseam. Je me demande si l'on ne devrait pas apprendre à désapprendre. A force de s'encombrer le cerveau de croyances, de systèmes de penser, d'idées philosophiques prêtes à porter, je me demande comment avoir un esprit neuf. Comment s'étonner chaque jour, chaque seconde de la vie qui passe, des joies et bonheurs simples? Comment aimer mieux et plus? Comment vivre avec les autres sans les étiqueter à la moindre seconde?
"Un intellectuel assis va moins loin qu'un con qui marche" disait Audiard. Qu'avons nous fait de cette sagesse? Ne devrions nous pas devenir, redevenir des explorateurs ignorants. J'espère qu'il va se passer quelque chose dit le jeune mousse à son capitaine embarquant pour la première fois en mer. Quelle belle et magnifique ambition. Jacques Rancière envoies nous le maitre ignorant qu'il nous enseigne l'art du désapprentissage.
Désapprendre n'est-il pas la base de toute nouvelle empreinte? Mais comment faire? Peut-on décider de laisser de côté ses souvenirs? Sa langue maternelle? Puis je ne plus la parler? Est-il possible de l'oublier?
Comment avoir été et devenir encore tout neuf? Peut-on s'interdire de faire référence à ce que nous aimons? Aux préférences qui nous constituent? Rien n'est moins sur, à moins de se plonger dans un environnement lointain et étranger. Si apprendre est un processus d'intériorisation, alors désapprendre est-il un processus d'extériorisation? Il faudrait tout dire et tout partager pour le désapprendre?
Comment nait l'oubli? Pourquoi est-il une consolation du futur qui arrive à nous tout frais, doté de toutes les possibilités? Désapprendre passe par l'oubli de ce qui nous tire vers le passé. C'est ouvrir de nouvelles gammes de réactions. Désapprendre c'est alors se prendre d'affection pour ce qui vient, que l'on ignore et que l'on espère. Désapprendre est donc une posture qui nous projette demain. car l'on ne sait rien de demain.