La numérisation massive et continue des institutions mais surtout des foyers[1] incite à penser qu’il est envisageable de tirer parti des moyens dont chacun est maintenant doté pour apprendre. Pour prendre une image, il serait possible de dire « maintenant que chacun a un stylo, nous allons pouvoir commencer à écrire ». L’idée d’une littératie numérique[2] fait son chemin. Les compétences informationnelles sont désormais fortement présentes dans des organisations en projets qui ont besoin d’échanger un fort volume d’informations.
Il existe une variété de termes pour désigner des modalités d’apprentissage valorisant les techniques et les outils électroniques, ce qui est couramment désigné comme e-learning en anglais ou e-formation en Français. Le « e » est la première lettre du mot électronique. Il donne une place proéminente à l’outil. Ce qui est pour le moins réducteur car il ne viendrait à l’idée à personne de parler de l-formation (« l » pour livre), de v-formation (« v » pour vidéoprojecteur) en fonction de la place de ces aides pédagogiques dans l’apprentissage. A ce compte, il serait possible de varier les lettres à l’infini des techniques ou des outils, ce que l’on ne se prive pas de faire avec le m-learning, ou le u-learning le « m » faisant référence à la mobilité autorisée par les téléphones portables ou le « u » à l’ubiquité. Les savoirs devenant désormais accessibles au moment souhaité par le moyen de terminaux téléphoniques portables (Unesco 2012).
Dans le champ sémantique de « la formation avec un ordinateur »[3] de nombreux termes plus spécialisés sont utilisés. Il est ainsi possible de mentionner :
- la formation à distance
- la formation ouverte et à distance
- la formation numérique
- le social-learning
L’apprentissage en ligne est le terme retenu dans ce texte pour désigné toute forme d’apprentissage utilisant un canal et reliant l’apprenant à des supports, d’autres apprenants, des logiciels. A côté des canaux traditionnels « le formateur », « le livre », « les groupes humains », un nouveau canal se met en place renouvelant les rôles et fonctions. C’est en particulier l’attention portée à l’organisation pédagogique qui revoie les perspectives jusqu’à là établies.
L’apprentissage en ligne peut être séparé en 3 segments selon le critère de l’attention porté à l’organisation de l’environnement numérique considéré :
Figure 1 : typologie d’apprentissage en ligne
Incidemment ces trois modalités d’apprentissages renvoient à des conceptions différenciées de l’acte d’enseigner et de celui d’apprendre.
Ø L’apprentissage organisé est souvent une transposition des modalités classiques d’enseignement, qui cherche à planifier un programme, mesurer les progressions, valider l’exposition à des contenus et la mémorisation de savoir. Certains auteurs distinguent le learning qui est l’apprentissage de point de vue de l’apprenant et le teaching qui est l’apprentissage du point de vue de l’enseignant. Il est alors possible d’évoquer de façon péjorative l’idée d’e-teaching. Les pratiques classiques d’enseignement seraient ainsi traduites sans remises en perspective au regard des nouvelles possibilités offertes par la technique.
Ø L’apprentissage semi-organisé n’est pas exempt d’intention pédagogique. Le concepteur de logiciels libres mis à disposition espère bien que des utilisateurs vont se saisir des espaces proposés, voire enrichir les communautés libres qui se constituent sur un intérêt ponctuel. Ici c’est une forme de socioconstructivisme qui se laisse apercevoir. La confrontation au groupe grâce à la médiatisation induit une confrontation de ses croyances à celles des autres et à une expression d’opinion.
Ø Dans l’exploration libre, c’est l’individu lui-même qui se définit ses propres intentions. Il y a tout lieu de penser qu’en matière d’apprentissage, les conditions soient celles que l’on prête aux situations d’autodidaxie. L’individu fixe ses propres objectifs et moyens pour apprendre, mais aussi pour jouer ou se distraire.
[1] Plus de 80% des ménages Français auraient un ordinateur, 70% un accès à internet en 2011 soit plus de 40 millions d’internautes, mais également 19 millions de mobinautes (mot composé à partir du téléphone mobile)
[2] Selon l’OCDE, la littératie est « l’aptitude à comprendre et à utiliser l’information écrite dans la vie courante, à la maison, au travail et dans la collectivité en vue d’atteindre des buts personnels et d'étendre ses connaissances et ses capacités. » (dans le rapport publié le 14 juin 2000 : La littératie à l’ère de l’information)
[3] « La formation avec un ordinateur » serait une locution largement suffisante pour exprimer de nombreuses situations mobilisant l’électronique
[4] Le sociologue Patrice Flichy (2010) recense en France 2 millions de blogueurs. Il y aurait en France prés de 1,35 millions de contributeurs à Wikipédia.